Mystères 15
L’expédition maudite du groupe Donner
Albert Bierstadt : Émigrants traversant les plaines.
Les mirages de la Californie ont attiré plus d’un aventurier loin de son foyer. En quête de richesses, de terres ou simplement d’un nouveau départ, les pionniers ont parfois tout misé sur un voyage semé d’embûches.
Groupe
Parti du Midwest, un groupe s’englue dans les neiges du Nevada pendant l’hiver 1846. Récit d’une aventure cauchemardesque en filigrane de l’Histoire.
Californie
En 1846 la Californie est encore mexicaine, peuplée en majorité d’indigènes aux langages colorés. Le paysage : nu, vierge d’urbanisme, hérissé de quelques ranchs ou de missions religieuses aux murs blancs. San Francisco est un village branlant de deux cents âmes.
Ouest
L’ébullition de l’Or n’est pas encore passée par là ; néanmoins, l’Ouest Américain attire quelques explorateurs, qui désertent leurs foyers dans l’espoir d’une vie meilleure, sauvage, au cœur de la nature.
Frontières
D’autres veulent repousser les frontières de la civilisation américaine au nom d’une « destinée manifeste », tous empruntent une piste caillouteuse de plusieurs milliers de kilomètres : le California Trail.
Les traces des pionniers sont encore visibles de nos jours, le passage des chariots tractés par le bétail étant profondément incrusté dans le sol. (Photo: Paul Hermans Wikipedia, CC BY-SA 3.0).
Trappeurs
D’abord fréquenté par les trappeurs et les aventuriers, ce chemin s’assouplit sous les roues des wagons qui le parcourent quotidiennement. Il traverse les déserts, louvoie entre les montagnes, s’incline devant les ravins.
Routes
L’été 1846 rassemble une foule sur les routes de l’exode : deux familles, les Donner et les Reed, y font route de concert.
Procession
Il y a là trente-deux personnes au bas mot, hommes, femmes et enfants, sans compter leur employer et les marcheurs éphémères qui se joignent à la procession.
Territoire
Pour s’orienter sur ce territoire austère, ils comptent sur un livre de voyage intitulé Émigrants’ Guide to Oregon & California.
Stanford Hastings
Son auteur, un certain Stanford Hastings, est un aventurier sans scrupules qui enjoint les pionniers à s’engager sur « son » raccourci, censé épargner aux voyageurs, plus de 500 kilomètres de route, tout en leur offrant un cheminement agréable et sans mauvaises surprises.
Comptoir
Trop beau pour être vrai ? Certainement : Hastings n’a jamais fréquenté ce chemin, mais conclu un marché avec un homme qui possède un comptoir dans la région, sa manœuvre fera tomber plus d’un voyageur dans le panneau.
Familles
Sûres d’elles, les familles Reed et Donner s’engagent donc dans le « Hastings Cutoff » à la fin du mois de juillet 1846.
Chemin
Très vite, le chemin se révèle bien plus difficile qu’annoncé, encombré de roches, de végétation touffue et d’arbres déracinés.
Ingrate
La route est ingrate, la tâche fastidieuse : les voitures parcourent moins de deux kilomètres et demi par jour, à la fin du mois d’août 1846, l’atmosphère paisible et sauvage que connaissait le cortège s’est soudainement tendue.
Grossi
Grossi de plusieurs arrivées de dernière minute la procession compte désormais plus de 80 personnes le groupe doute finalement de l’itinéraire et des conseils « bienveillants » d’Hastings. Mais il est déjà trop tard pour faire demi-tour.
Weber Canyon dans les montagnes Wasatch de l'Utah, vers 1868 Bibliothèque du Congrès.
Continuer
Il faut donc continuer, malgré l’épuisement des corps et des bêtes qui tirent le cortège. Le manque de vivres commence à se faire sentir, et les outres sont quasiment vides.
Paysage
Le paysage devient plus aride à chaque jour qui passe, muant des sommets de rocaille aux déserts de sel.
Chariots
Les roues des chariots s’enlisent dans le sel chauffé à blanc, et leurs essieux se brisent. On abandonne bœufs et chevaux morts de soif. Parfois le bétail, rendu fou par la chaleur, fuit à travers ce désert d’une blancheur assommante.
Épuisement
À la fin du mois de septembre 1846, malgré l’épuisement et la perte d’un grand nombre de bêtes et de wagons, l’expédition Donner-Reed finit par rejoindre le tracé original du California Trail.
Raccourci
Le raccourci leur a fait perdre un mois sur leur itinéraire. Et leur calvaire est loin d’être fini : le soleil ardent du désert passe désormais le relais aux neiges d’octobre 1846.
Expédition
Pour couronner le tout, l’expédition s’est divisée en petits groupes qui avancent chacun à leur rythme, méfiants les uns des autres.
Esprits
Les esprits s’échauffent : les coups de fouet et coups de poignard sont parfois échangés entre les pionniers. Les tribus indiennes en profitent pour voler ou tuer le bétail des explorateurs.
Le 20 octobre 1846, le cortège, chapelet de haillons, affronte la dernière difficulté du voyage.
Cortège
Le 20 octobre 1846, le cortège, chapelet de haillons, affronte la dernière difficulté du voyage : le col qui toise le Lac Tuckee (et qui deviendra connu sous le nom de Donner Pass.), dominant du haut de ses 2100 mètres l’inhospitalière Sierra Nevada.
Hiver
Encore un malheureux coup du sort : l’hiver, 1846 est particulièrement rigoureux, et les neiges se déposent un mois en avance.
Passage
Le passage de la montagne est donc bloqué début novembre, forçant les pionniers à reculer et à se planter au bord du Lac Tuckee.
Cabanes
Ces derniers bâtissent des cabanes en rondins pour s’abriter, mais la pluie parvient à pénétrer à l’intérieur ; les tempêtes de neige s’intensifient et le bétail succombe.
Carcasses
Leurs carcasses gelées s’échangent à prix d’or entre les pionniers devenus profondément égoïstes, soucieux de leur seule survie, on mange de la peau de bœuf bouillie, quitte à la décrocher des toits des cabanes ou des tapis qui isolent le sol.
Rats
Quelques rats égarés offrent un véritable festin à leurs chanceux chasseurs.
Secours
Une expédition de secours est finalement mise sur pied, recours ultime à plusieurs dizaines de personnes (dont deux tiers d’enfants) affamées et gelées, après trente-trois jours de marche funèbre, les membres survivants sont secourus le 17 janvier 1847.
Autorités
Ils préviennent aussitôt les autorités locales déjà débordées par le conflit américano-mexicain afin d’envoyer les secours : lorsque ces derniers parviennent enfin au pied du Lac Tuckee, ils découvrent un spectacle horrifiant.
Cannibalisme
Certains rescapés ont eu recours au cannibalisme pour survivre, grignotant les cadavres de leurs compagnons d’infortune.
Le Donner Pass, photographié lors d’une expédition de reconnaissance des années (Photo: T. H. O’Sullivan/King Survey Wikipedia).
Destination
87 personnes avaient pris part à l’expédition. 48 atteindront leur destination en vie. Le bétail a eu encore moins de chance : chevaux et bœufs ont tous péri.
Mules
Seules trois mules survivent à l’épisode cauchemardesque qui sera popularisé dans les journaux à sensation sous le nom de « Donner Party ».
Fascination
S’il exerce encore aujourd’hui une sorte de fascination morbide, c’est sans aucun doute parce qu’il loge désormais au Panthéon des mythes fondateurs du Wild West.
Pionniers
Certes, le quotidien des pionniers n’a pas toujours été aussi sinistre ; mais la route fut souvent chaotique,imprévisible faite d’échardes, de tempêtes et de sursauts d’égoïsme.
Aventure
Un an plus tard, en 1848, commence la plus grande aventure de l’Ouest américain. Un charpentier nommé James Marshall fait bâtir une scierie sur la rive de l’American River : à sa grande surprise, il y déniche des paillettes d’or.
Ruée
C’est le début de la Ruée vers l’or, qui précipite la plus grande migration humaine de l’histoire des États-Unis vers la Californie.
Orpailleurs
Des centaines de milliers d’orpailleurs quitteront femme et enfants pour marcher sur ses traces. Combien emprunteront le raccourci d’Hastings ?
San Francisco
C’est le début de la richesse pour la Californie. San Francisco sort de son isolement pour devenir en quelques années une métropole effervescente aux saloons et aux maisons de passe toujours bien garnis.
Autoroute
Le California Trail se transforme en autoroute pétrie de promesses, tandis que le « Hastings Cutoff », jugé trop dangereux (en partie à cause des déboires médiatisés de l’expédition Donner) est oublié.
Virginia Reed
« Mary, n’emprunte jamais de raccourcis et presse-toi sur la route aussi vite que tu le peux » écrit Virginia Reed, l’une des rescapées, à sa cousine en 1847. Sage conseil.
San Francisco en 1851. Un vrai décor de western. (Source: Library of Congress/DAG no. 1331).
Migration
L'expédition des Donner et des Reed ne sera pas la dernière horreur de la grande migration californienne, des dizaines de milliers d’Amérindiens, chahutés par des pionniers louchant sur leurs terres, sont liquidés en masse : plus de cent mille victimes en une dizaine d’années.
Génocide
Un génocide rapidement balayé par les poignées d’or qui circulent de main en main. Ainsi, le Far West fut-il colonisé, dans un sillon d’or, de gel et de sang.
Les Rods : phénomènes mystérieux de la Cryptozoologie
Que sont les Rods ?
Il s'agirait de créatures volantes si rapides que l'œil humain ne serait pas capable de les voir. Certains pensent cependant qu'ils ne sont rien d'autre que des artefacts engendrés par le déplacement à vive allure de certains animaux.
Observations
La quasi-totalité des observations de fulgures se sont faites par enregistrement vidéo, peut-être en raison de la capacité des appareils vidéo à produire des artefacts lorsqu'ils enregistrent le vol rapide d'animaux, insectes ou oiseaux.
Popularité
La toute nouvelle popularité des fulgures est le fruit d'une nouvelle exposition médiatique.
José Escamilla
Filmés pour la première fois par José Escamilla, affirmant avoir découvert une nouvelle espèce, que sont les Rods ? Des engins bizarres, des êtres vivants ?
Évoluer
En tout cas, ils semblent évoluer en "rupture de continuité", une démarche théorique où le déplacement se ferait par saccades, suivant une autre progression temporelle que la nôtre, apparaissant à notre attention uniquement lors d'interférences avec notre propre cours du temps.
L'homme de l'espace : un père prend sa fille en photo et crée un mystère toujours pas résolu depuis 1964
Jim Templeton's photographie.
Le 24 mai 1964, Jim Templeton, pompier à Carlisle, Cumberland, âgé de 44 ans, et photographe amateur, partit en excursion au Solway firth (golfe de Solway, qui marque la frontière entre l'Angleterre et l'écosse), Il était avec sa femme, Annie, et sa fille Elizabeth, âgée de 5 ans.
Appareil
Il avait, bien sûr emmené son appareil photo, un Zeiss Contax "Pentacon F". L'endroit était quasiment désert, et sur place, il ne rencontra que deux vieilles dames.
Photos
Il prit trois photos en couleurs. L'une ne montrait que le chemin, désert, vers la mer. Une autre montrait sa fille, et sa femme cueillant des fleurs à quatre pattes, et la troisième montrait sa fille, bien cadrée et prenant la pose.
Astronaute
Extraordinaire ! Par quel miracle un astronaute pouvait, il apparaître derrière la tête de la petite fille ? M. Templeton ne se rappelait pas avoir vu autre chose que sa fille dans son viseur.
Photographie
La photographie vint bien vite en couverture du journal local, le Cumberland News, et dès le lendemain dans le Daily Mirror et le Daily Express, puis bientôt dans les journaux nationaux, et même du monde entier.
Mercury
Rappelons-nous qu'en 1964, cela faisait trois ans qu'on envoyait des humains dans l'espace. L'image de l'astronaute en scaphandre, comme ceux du projet "Mercury"
Seulement
Seulement, ce ne pouvait être un astronaute terrestre. Ils portaient bien des scaphandres blancs, mais comme le montre la photo de John Glenn, à droite, leurs visières n'étaient pas teintée et ne pouvaient donc avoir un aspect sombre.
Négatif
Le négatif du film semblait tellement authentique que la firme Kodak offrit une récompense à qui prouverait qu'il s'agissait d'une fraude. Récompense toujours pas réclamée d'ailleurs.
Bruce Prickett
Cependant, le sergent de police Bruce Prickett fut plus sceptique : (Je suis moi-même un photographe expérimenté, le négatif n'a certainement pas été trafiqué.).
Image
Était-il possible que l' de l'astronaute ait pu être enregistrée par la photo, mais pas par l'œil ? Aurait-ce été un astronaute invisible aux humains ? Un astronaute extraterrestre ?
Jim Templeton, 76 ans, et Elizabeth (Templeton) Dobson, 37 ans. Crédit : Dumfries Courier , 3 mai 1996, "Close Encounters" (photo de droite accompagnant l'article).
Pourquoi
Mais pourquoi l'appareil photo aurait il "capturé" l'astronaute, et pas son engin ? N'était-ce pas plutôt un voyageur du temps ?
Explications
Il fallait se rabattre sur des explications plus prosaïques. Si l'astronaute était illusoire, ce pouvait être une une paréidolie.
Objet
L'objet aurait pu alors n'être qu'un simple nuage, d'autant que ce qui paraissait une ombre sous un bras pouvait n'être qu'une mèche de cheveux de l'enfant. Mais comment M. Templeton ne l'aurait-il pas remarqué ?
Psychologie
On fit appel à la psychologie du témoignage : un témoin qui s'intéresse attentivement à une chose, ici M. Templeton essayant de photographier sa fille, ne remarque pas le reste, ici le mystérieux personnage vêtu de clair.
Remarque
Une remarque plus terre-à-terre, plus technique, mais aussi plus incontournable, fut que l'appareil photo de M. Templeton, un Pentacon, ne montrait dans son viseur que 70 % du champ qui apparaissait sur la pellicule.
Propriété
C'était là une malencontreuse propriété des appareils photo reflex, qui a disparu avec les appareils photo numériques pourvus d'un écran. C'était surtout pourquoi M. Templeton n'avait quasiment rien vu dans son viseur, de l'être qui se trouvait derrière sa fille.
Soupçonné
Et c'est aussi pourquoi M. Templeton aurait eu des raisons d'être furieux contre la marque Zeiss Pentacon, on l'a soupçonné d'avoir menti en prétendant n'avoir rien vu dans son viseur.
Farceur
On l'a soupçonné d'être un farceur. La vérité est qu'il n'y a pas eu de réponse concluante à cette énigme depuis plus de 55 ans.
Affirmer
Jim a continué à affirmer jusqu'aux derniers moments de sa vie que personne ne pouvait être en arrière-plan à ce moment-là.
Cléopâtre : d'après la toute première reconstitutions 3D de son visage
Cléopâtre la graphiste Becca Saladin crée des versions 3D.
Égyptienne, grands yeux en amande maquillés, nez fin, bouche pulpeuse, cheveux mi-longs à frange droite, grande et élancée, teint légèrement mat : si vous avez tout de suite pensé à Cléopâtre, c’est que vous êtes probablement comme nous.
Beauté
Largement décrite comme une beauté sauvage sans égale, la plus populaire des Reines d’Égypte Antique semble avoir tout pour plaire d’un point de vue physique.
Découverte
Pourtant une découverte datant de quelques années a permis de constater que, finalement, la femme fatale qui fait tourner toutes les têtes sur son passage n’a en réalité probablement jamais existé.
Producteurs
En 1963, lorsque les producteurs d’Hollywood ont décidé de relater l’histoire de Cléopâtre et de son idylle avec l’Empereur Romain Jules César, ils étaient loin de s’imaginer que la légende de la Reine égyptienne n’avait strictement rien à voir avec la réalité des faits historiques.
Antiquaire
Ainsi, en février 2007, un antiquaire de NewCastle en Angleterre a découvert une pièce de monnaie où l’on peut voir le vrai visage de Cléopâtre.
Nez
On y distingue aisément un nez crochu, doublé d’un large menton, un petit front et un cou peu gracieux, bien loin de ce que nous avons toujours imaginé.
Séductrice
« Elle n’était pas cette séductrice glamour que les cinéastes semblent tellement aimer. Rien n’indique qu’elle ait eu plus de deux compagnons : Julius Caesar, auquel elle était fidèle jusqu’à son décès, et Marc Antoine. »
Joyce Tyldesley
« Mais je pense que nous aimons la voir ainsi, cela a quelque chose d’attrayant, certes, mais c’est injuste. » Déclare Joyce Tyldesley, Archéologue et Égyptologue anglaise.
Reine d’Égypte Antique Cléopâtre VII Philopator à gauche et Marc Antoine, Général et homme politique romain à droite (l’un de ses partenaires de vie), Louisonze, Wikipedia Commons.
Image
Pour ainsi dire, l’image que nous avons de Cléopâtre n’est autre qu’un fantasme de longue date véhiculé depuis des siècles par des philosophes, l’Empereur César lui-même, ou des hommes de lettres comme Shakespeare qui en ont fait un véritable symbole.
Relation
Quoi qu’il en soit, cela n’a pas empêché à la Reine d’entretenir une relation amoureuse avec les deux hommes les plus puissants de l’Empire romain, à savoir Jules César et Marc-Antoine, et faire croire au monde entier qu’elle était la réincarnation de la déesse Isis.
Image Foundry Studios.
Charisme
Bien qu’elle n’était pas aussi belle que la représentation physique que l’on s’en fait aujourd’hui, la Reine ne manquait certainement pas de charisme : durant son règne, qui a duré 21 ans (de 51 à 30 av. J.-C.).
Redresser
Cléopâtre a réussi à redresser à elle seule l’image, et surtout la force du Royaume d’Égypte qui battait de l’aile pendant la gouvernance de son père et Roi Ptolémée XII.
Kulturologia.
Instruite
Très instruite, son vrai charme réside surtout dans son intelligence et son goût prononcé pour le savoir : polyglotte, elle parlait près de 12 langues différentes.
Mathématiques
Certains hommes de lettres de l’époque affirment même qu’elle était particulièrement douée pour les mathématiques, la médecine, l’astronomie ou encore la philosophie.
Infections
D’ailleurs, le k’hôl qu’elle portait n’était pas utilisé pour se maquiller les yeux, mais se voulait purement médical et la protégeait des infections.
Une autre pièce où l’on voit la Reine.
Récits
En outre, de nombreux récits datant de l’Antiquité (visiblement occultés par l’imaginaire populaire) confirment que la beauté de Cléopâtre était intellectuelle avant tout.
Charme
« Car sa beauté, disait-on, n’était pas en soi incomparable ni susceptible de frapper ceux qui la voyaient ; mais converser avec elle avait un charme irrésistible. Il y avait aussi de la douceur dans les tons de sa voix disait Plutarque. »
Everest : le mystère Mallory et Irvine persiste
© Le Sommet des Dieux – 2021 / Julianne Films / Folivari / Mélusine Productions / France 3 Cinéma.
Mallory et Irvine : y a-t-il, dans toute l’histoire de l’alpinisme, une cordée plus célèbre ? Une cordée qui aura fait couler plus d’encre ?
Disparition
Près de 100 ans après leur disparition sur les pentes supérieures de l’Everest le 8 juin 1924, l’impénétrable destin de George Mallory et Sandy Irvine n’a toujours pas fini de faire parler et la clé du mystère est toujours coincée dans ce fichu Kodak Vest Pocket.
Enquête
L’enquête, rendra-t-elle seulement un verdict un jour ? Pas sûr.
Laborieuse
Après la laborieuse expédition de 1921 qui avait permis à George Mallory et ses compagnons d’atteindre le col Nord et de repérer une voie d’accès vers le sommet.
Britanniques
Les Britanniques avaient compris que pour aller plus haut, il fallait œuvrer avant la mousson, ce qui laissait peu de temps pour organiser une nouvelle expédition au printemps de l’année suivante.
Équipe
Au début du mois de mai 1922, une nouvelle équipe débarque pourtant au camp de base avec le général Charles Bruce à sa tête.
George Mallory
Avec Edward Norton, Howard Somervell, Geoffrey Bruce et surtout George Finch, as de l’escalade glacière, George Mallory est bien mieux épaulé que l’année précédente, et à la mi-mai, les hommes sont déjà rendus sur la rampe de lancement du col Nord.
Premiers
Le 20 mai, Mallory, Somervell, Norton et Morshead sont les premiers êtres humains à franchir la barre mythique des 8 000 mètres et, avant de faire demi-tour, le quatuor établit un nouveau record mondial d’altitude en atteignant 8 225 mètres.
Oxygène
Deux jours plus tard, ce sont George Finch et Geoffrey Bruce qui s’élancent à leur tour, équipés d’un tout nouveau matériel qui fait déjà débat : l’oxygène artificiel. Grâce à « l’air anglais », comme l’appellent les sherpas, les deux hommes portent la marque à 8 326 mètres.
Mousson
Début juin, la mousson approche et les hommes sont éreintés, mais Mallory en veut encore. Motivé comme jamais, il se démène pour organiser une ultime tentative qui se terminera, le 7 juin.
Drame
Un terrible drame avec la mort de sept sherpas emportés par une avalanche près du col Nord. Mallory rentre en Angleterre rongé par le remords et un impérieux besoin de revenir.
Patienter
Mallory doit pourtant patienter deux ans avant de pouvoir retourner vers le sommet de ses rêves. Le Mont Everest Committee manquant de fonds pour organiser une nouvelle expédition, l’année 1923 est consacrée à une lucrative tournée de conférences à travers le monde.
Pourquoi
C’est au cours de l’une d’entre elles, à New York, que Mallory lâche son fameux « Parce qu’il est là ! » En réponse à un journaliste du New York Times qui lui posait toujours cette même question : pourquoi vouloir gravir l’Everest ?
Retour
Les Britanniques, toujours emmenés par le général Bruce, sont de retour sur le glacier du Rongbuk, avec une belle cargaison de bouteilles d’oxygène, mais sans George Finch, écarté en raison de son caractère un peu trop volcanique.
Compétences
Ses compétences en glace et dans le maniement des appareils à oxygène font défaut, mais pour le remplacer, le comité de l’Everest fait appel au jeune Andrew « Sandy » Irvine dont les talents de bricoleur compensent le manque d’expérience en montagne.
Expérience
Avec l’expérience emmagasinée lors des deux expéditions précédentes, Mallory est cette fois-ci persuadé que le sommet lui tend les bras.
Débuts
Les débuts sont pourtant laborieux. La météo est exécrable, les hommes souffrent de l’altitude et les porteurs, encore très marqués par le drame de 1922, sont plus réticents à l’idée de s’aventurer là-haut.
Tentative
À la fin du mois de mai, aucune tentative sommitale n’a encore eu lieu et la mousson approche. Il faut revoir les plans et abandonner l’idée de grimper avec l’oxygène artificiel, trop gourmand en logistique.
Camp
Le 3 juin, Howard Somervell et Edward Norton établissent un camp VI à 8 170 mètres puis s’élancent vers le sommet le lendemain matin. Somervell renonce vers midi et regarde son compagnon s’élever lentement jusqu’au pied d’un long couloir (le futur couloir Norton) qu’il a repéré, légèrement en dessous de l’arête.
Norton
Norton fera finalement demi-tour à l’altitude prodigieuse de 8 570 mètres, nouveau record.
Monter
Personne ne réussira à monter plus haut sans oxygène jusqu’à la première de Reinhold Messner et Peter Habeler, 54 ans plus tard. Pendant ce temps-là, au col Nord, Mallory prépare la suite… Et sa fin.
Oxygène
Après avoir fermement condamné son utilisation lors de l’expédition de 1922, Mallory finit par admettre qu’il est impossible d’aller au sommet sans oxygène artificiel.
Col
Le 6 juin 1922, depuis le col Nord où les sherpas ont réussi à déposer quelques cylindres, Sandy Irvine vérifie les derniers réglages avant de hisser le lourd chargement sur son dos.
Avis
Contre l’avis de Norton qui jugeait l’expérience alpine de Noel Odell bien plus précieuse, Mallory a donc choisi de privilégier le jeune Irvine (22 ans seulement) et ses aptitudes à dompter ces fameux appareils au fonctionnement parfois erratique.
Matin
À 8 h 40, ce matin-là, les deux hommes quittent le col Nord et se mettent en route vers la cime.
Promontoire
Deux jours plus tard, alors qu’il vient d’escalader un petit promontoire vers 7 000 mètres pour tester sa forme.
Noel Odell
Noel Odell lève la tête et aperçoit soudain deux petites silhouettes progressant lentement en direction de la pyramide sommitale de l’Everest, il est 12 h 50, le mauvais temps se lève, Mallory et Irvine disparaissent dans les nuages. On ne les reverra jamais.
© Le Sommet des Dieux – 2021 / Julianne Films / Folivari / Mélusine Productions / France 3 Cinéma / AuRA Cinéma
Scène
Quelle scène s’est donc jouée, ce fameux 8 juin 1924, lorsque le rideau nuageux s’est baissé sur les pentes sommitales de l’Everest, théâtre de tous les mystères ? Qu’est-il arrivé à Mallory et Irvine, les deux acteurs de la tragédie ?
Jour
Nul ne le sait vraiment, mais depuis ce jour fatidique, l’histoire de l’alpinisme vacille : avant de disparaître, les deux hommes ont-ils atteint le Toit du monde, 29 ans avant Edmund Hillary et Tenzing Norgay ? Faudra-t-il, un jour, réécrire le scénario ?
Enquête
L’enquête, toujours en cours à ce jour, débute par l’analyse du récit de Noel Odell, le dernier à les avoir vus vivants.
Témoignage
Odell ne sait pas dire avec précision où se trouvaient les deux alpinistes avant de disparaître. Étaient-ils arrivés au niveau du premier ou du deuxième ressaut ?
Détail
Le détail a de l’importance puisque si le premier ressaut n’a rien d’insurmontable, le deuxième, situé à 8 600 mètres d’altitude, est en revanche un sérieux obstacle sur la voie tibétaine de l’Everest.
Sommet
Le franchir, c’est s’ouvrir la porte du sommet. « Comme une seule partie de l’arête sommitale est visible, il m’est impossible de dire avec une certitude absolue qu' ils étaient arrivés aux deux ressauts : vus d’en bas et de profil, ils se ressemblent beaucoup. »
Odell
Sur le moment, j’ai cru qu’il s’agissait du deuxième ressaut. « Rétrospectivement, je me demande si ce dernier ne m’aurait pas été caché par des rochers au premier plan », dira Odell.
Indice
Le deuxième indice de l’enquête arrive en lorsque les Britanniques reviennent à l’Everest après neuf ans d’abstinence. le 30 mai 1933, Lawrence Wager et Percy Wyn-Harris découvrent un piolet posé sur une dalle rocheuse, environ 200 mètres sous le premier ressaut
Inscription
L’inscription « Willisch de Täsch », nom du fabricant suisse, et les trois petites encoches découvertes sur le manche confirment qu’il s’agit bien de celui de Sandy Irvine.
Hypothèse
Le piolet et la torche électrique retrouvée dans les restes du camp VI permettent d’établir une première hypothèse, celle de la chute dans l’obscurité. Aucune des autres expéditions organisées pendant les années 1930 ne trouvera le moindre indice.
Personne
Et personne ne parviendra à faire mieux que les 8 570 mètres d’Edward Norton…
Guerre
Personne n’y parviendra non plus lors de la décennie suivante puisque la guerre met la conquête de l’Everest entre parenthèses avant que l’ouverture des frontières népalaises aux alpinistes au début des années 1950 n’envoie la suite des opérations sur le versant sud de la montagne où Edmund Hillary et Tenzing Norgay finissent par atteindre le sommet le 29 mai 1953.
Tibet
Le Tibet, lui, est désormais aux mains des Chinois qui ferment l’accès de l’Everest aux étrangers.
Printemps
Au printemps 1960, une énorme expédition à la solde de Mao revendique finalement la première ascension du versant nord, mais le récit paru dans les organes de propagande du Parti est beaucoup trop confus pour être crédible.
Lire
On peut notamment y lire que les grimpeurs de tête auraient franchi le deuxième ressaut en sacrifiant l’un des leurs pour jouer le rôle d’échelle humaine.
Ascension
Plus crédible, semble être la deuxième ascension, réussie 15 ans plus tard par une nouvelle expédition chinoise qui installe cette fois-ci une grande échelle sur le deuxième ressaut et laisse un trépied métallique à demeure au sommet.
Chine
En 1979, la Chine autorise à nouveau les alpinistes étrangers sur son versant nord où une expédition japonaise vient tenter sa chance.
Wang Hongbao
À cette occasion, un porteur chinois du nom de Wang Hongbao raconte à l’un des grimpeurs japonais que lors de l’expédition de 1975, il a vu, quelque part vers 8 000 mètres, le corps d’un « vieil Anglais mort » qui ne peut être que celui de Mallory ou Irvine.
Avalanche
Mais Hongbao n’aura pas le temps de donner plus de détail puisque le lendemain de sa déclaration, il est emporté par une avalanche.
© Le Sommet des Dieux – 2021 / Julianne Films / Folivari / Mélusine Productions / France 3 Cinéma / AuRA Cinéma.
Ascension de l’Everest
À partir des années 1980, l’ascension de l’Everest se démocratise et certains historiens passionnés se mettent à rêver d’une expédition entièrement dédiée à la recherche du Vest Pocket de Mallory.
Expédition
En 1986, l’Américain Tom Holzel parvient à monter une première expédition de recherche, mais le mauvais temps sape les espoirs avant même d’avoir atteint 8 000 mètres. Il faut attendre près de 15 ans pour voir une nouvelle expédition se lancer sur les traces de Mallory et Irvine.
Jochen Hemmleb
Cette fois, c'est l’Allemand Jochen Hemmleb, lui aussi obsédé par le mythe, qui parvient à mettre sur pied une équipe très expérimentée dont l’Américain Conrad Anker est la tête d’affiche.
Zone
Le 1er mai 1999, Anker et ses compagnons de cordée atteignent la zone de recherche définie grâce au témoignage de Hongbao et commencent à se disperser chacun de leur côté. Peu avant midi, Anker aperçoit soudain une forme d’aspect inhabituel dont la couleur blanche l’intrigue.
Blanc
« Ce n’était pas le blanc étincelant de la neige réfléchissant le soleil », précise-t-il dans À la recherche des fantômes de l’Everest (Glénat, 2000), le livre relatant cette expédition historique. En s’approchant, l’Américain découvre un corps étendu face contre terre, avec une jambe brisée.
Chaussure
Sous la seule chaussure ayant résisté à ce qui s’apparente à une chute, les clous trahissent l’époque : il ne peut s’agir que de George Mallory ou Sandy Irvine. Quelques minutes, plus tard, ses compagnons le rejoignent et entreprennent quelques fouilles archéologiques.
Objets
Dans les poches de l’alpiniste, divers objets comme un taille-crayon, une petite paire de ciseaux, un biscuit à la menthe, un mouchoir brodé, une boîte d’allumettes ou une paire de lunettes ; sur le col de sa chemise, une étiquette avec l’inscription : « G. Mallory ». Mais d’un Kodak Vest Pocket, pas l’ombre.
Découverte
La découverte est capitale, mais la clé du mystère est ailleurs, probablement avec le corps de Sandy Irvine qui repose lui aussi quelque part sur le versant nord de l’Everest. Où ? Mystère…
Jochen Hemmleb
En 2001, Jochen Hemmleb organise une nouvelle expédition de recherche qui ne donne rien, mais quelques mois plus tard, coup de théâtre : interviewé par ce même Hemmleb, Xu Jing, l’un des membres de l’expédition chinoise de 1960, raconte que cette année-là, il a vu un corps, juste au-dessus de l’endroit où avait été retrouvé le piolet de Irvine en 1933.
Témoignage
À partir de ce nouveau témoignage et de l’agrandissement d’une photo aérienne haute définition, Tom Holzel réussit, à la fin des années 2000, à définir une nouvelle zone de recherche vers laquelle plusieurs expéditions tentent leur chance en 2010, 2011 et 2019. Mais toutes rentrent bredouilles…
Certitude
Près de 100 ans après leur disparition sur l’arête nord de l’Everest, personne n’est aujourd’hui en mesure de dire avec certitude si oui ou non Mallory et Irvine ont pu atteindre le sommet ce 8 juin 1924 avant de perdre pied à la descente.
Photo
Même si beaucoup aimeraient voir un jour apparaître la photo d’un Mallory triomphant sur le Toit du monde, il faut reconnaître que la balance penche très largement en faveur d’un demi-tour bien plus bas.
Indices
Plus que les quelques indices accumulés au fil des années, c’est la réalité du terrain qui fait dire à ceux qui sont passés par-là (Reinhold Messner en tête) que Mallory et Irvine n’ont pas atteint le sommet, et ce, principalement pour deux raisons.
Équipement
La première, c’est celle de l’équipement, bien trop sommaire à l’époque pour se protéger correctement des conditions infernales qui règnent au-dessus de 8 500 mètres où la veste en tweed n’a pas l’efficacité de la doudoune en Gore-Tex.
Encombrement
Argument auquel on peut ajouter l’encombrement et le poids des appareils à oxygène (plus de 13 kg à l’époque), ainsi que l’absence de crampons dont les lanières entravaient la circulation du sang à haute altitude.
Muraille
La deuxième raison est celle du deuxième ressaut, redoutable muraille de 30 mètres de haut qui se dresse à 8 600 mètres d’altitude peut-être encore plus rédhibitoire que le matériel.
Échelle
Depuis 1975, tous les candidats au sommet passant par le versant tibétain de l’Everest utilisent l’échelle métallique installée par les Chinois.
© Le Sommet des Dieux – 2021 / Julianne Films / Folivari / Mélusine Productions / France 3 Cinéma / AuRA Cinéma.
Obstacle
Mais en 1924, pour parvenir à leurs fins, Mallory et Irvine auraient dû gravir l’obstacle en utilisant simplement leurs pieds et leurs mains. Ce ressaut, Conrad Anker l’a gravi en 2007 en ayant préalablement fait enlever l’échelle.
Capacités
Il a estimé sa difficulté entre 5.9 et 5.10 (6a/6a+ sur l’échelle de cotation française), soit légèrement au-dessus des capacités de Mallory au niveau de la mer, c’est-à-dire sans la fatigue, le froid et le manque d’oxygène.
Leo Houlding
D’autres comme le Britannique Leo Houlding (en 2007 aux côtés d’Anker) et l’Autrichien Theo Fritsche (en 2011) ont eux aussi gravi le ressaut en libre, mais avec l’entraînement, l’expérience et l’équipement du grimpeur moderne.
Obsession
Il n’empêche que pour ceux qui se passionnent pour cette histoire depuis des décennies, l’affaire semble tourner à l’obsession.
Mark Synnott
En 2021, l’alpiniste américain Mark Synnott, membre de la dernière expédition de recherche de 2019, a publié un livre (The Third pole, Dutton, non traduit) dans lequel il échafaude une étonnante théorie du complot.
Autorités
Selon laquelle les autorités chinoises auraient mis la main sur le corps de Sandy Irvine et l’auraient fait disparaître afin de couper court à toute spéculation sur la première du versant tibétain de l’Everest.
Rebondissement
Crédible ou pas, cet ultime rebondissement ne fait que confirmer ce que le destin de George Mallory avait laissé entrevoir , depuis qu’il a été identifié comme le plus haut sommet du monde, l’Everest rend fou.
Date de dernière mise à jour : 15/05/2024